Alors que la situation sécuritaire dans l’est de la RDC demeure préoccupante, l’institut de recherche en droits humains (IRDH) a alerté, vendredi 31 octobre 2025, le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) sur l’arrivée massive, dans la soirée du 29 et la matinée du 30 octobre 2025, de miliciens lourdement armés appartenant au groupe dénommé Coalition Nationale pour la Libération du Congo (CNLC).
« …Ce groupe, sous le commandement direct d’Innocent Kaina, alias « India Queen », se dirige vers le village de Gety, territoire d’Irumu, dans la province de l’Ituri.
Un chercheur de l’IRDH, en visite à Gety — localité située à une cinquantaine de kilomètres au sud de Bunia — confirme le mouvement de ces miliciens d’Innocent Kaina. Il ressort que la tentative de s’emparer de Gety vise à ouvrir la voie vers le Sud-Est, en vue de prendre le contrôle total du village de Buguma (également appelé Buhuma à quinze kilomètres de Gety), un centre stratégique de négoce et d’exploitation aurifère, à la frontière entre la RDC et l’Ouganda », explique à la presse Hubert Tshiswaka Masoka, responsable de l’IRDH.
D’après lui, avant l’attaque contre Gety, les groupes armés CNLC et CRP avaient déjà frappé Iga Barrière et Lopa, dans leur offensive vers les sites aurifères de Mabanga et de Nizi. Toutefois, ils ont été repoussés par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC).
« En effet, Innocent Kaina collabore étroitement avec Thomas Lubanga, qui a également fondé, depuis Kampala en mars 2025, le groupe armé appelé CRP soit, Convention pour la Révolution Populaire. Les deux milices se réclamant du groupe ethnique Hema s’affrontent régulièrement contre la milice Lendu, Coopérative pour le Développement du Congo (CODECO), dans la lutte pour le contrôle des carrières et mines d’or, notamment sur le nouveau site stratégique de Buguma. Aux villages Gina et Lopa, dans le territoire de Djugu, à environ 25 Kilomètres, au nord de Bunia, le CODECO s’était violemment affronté à la CRP. Cette densité de violence qui affecte considérablement la population civile s’étend progressivement vers Gety et Buguma, où se trouve déjà la milice des Ngiti, Force de Résistance Patriotique de l’Ituri (FRPI), dirigée par le général autoproclamé Richard Mbadhu Adirodu », dit-il dans sa mise au point.
Pour rappel, Innocent Kaina est un ancien officier supérieur du Mouvement du 23 mars (M23), sanctionné par le Conseil de sécurité de l’ONU, le 30 novembre 2012 (Rés. 2078), pour son implication dans des violations graves des droits humains, notamment le recrutement d’enfants soldats et des attaques contre des civils depuis 2008 (Rés.1807). En avril 2025, Kaina a fondé son propre groupe armé, la CNLC, en ralliant des dissidents du M23, avec le soutien politique de l’Ouganda. Il réclame avoir le contre d’Aveba, dans la chefferie de Walendu Bindi, territoire d’Irumu.
« Selon les dernières informations disponibles, les affrontements survenus entre septembre et octobre 2025, entre les FARDC et les groupes armés CODECO, CNLC et CRP ont provoqué de graves crises humanitaires dans plusieurs localités de la province d’Ituri, notamment à Iga Barrière, Lopa, Kasenyi et Chomya. Ces violences entraînent des déplacements massifs de population, aggravant la vulnérabilité des villageois.
Face à cette situation, l’IRDH exprime sa vive inquiétude quant à la résurgence d’affrontements intercommunautaires entre les milices CNLC et CRP, majoritairement issues de la communauté Hema, et celles de la CODECO, affiliées à la communauté Lendu. L’Institut redoute que cette dynamique ne replonge la province de l’Ituri dans les violences interethniques meurtrières qui ont marqué la période 1999–2012 », lit-on dans cette mise au point de l’IRDH.
En conséquence, l’IRDH appelle les autorités congolaises à prendre des mesures urgentes pour sécuriser la population civile, en particulier dans la localité de Gety et l’ensemble du territoire d’Irumu, où la recrudescence des mouvements armés à base communautaire menace gravement la paix et la cohésion sociale.
« Par ailleurs, l’Institut insiste sur la nécessité de renforcer la surveillance des frontières, notamment avec l’Ouganda, d’ouvrir une enquête sur les éventuels soutiens extérieurs à ces groupes armés, et de mobiliser les mécanismes nationaux et internationaux de protection des droits humains afin de prévenir une nouvelle escalade de la violence dans la région », a renchéri Hubert Tshiswaka Masoka.
Jeff Kampoy
